Le retour
d’expérience sociologique SOCIOCUBE, mené sur la première édition du concours
CUBE 2020, révèle des facteurs psychosociaux incontournables pour obtenir des
changements de comportements de la part de salariés sur leur lieu de travail. Les
sociologues se sont notamment penchés sur le « contrôle comportemental
perçu », c’est-à-dire le degré de difficulté perçu au moment d’adopter un
nouveau comportement.
En effet, le sentiment de contrôle
détermine en partie l’intention d’adopter ou non un comportement écologique. Il
faut que les salariés se sentent capables de suivre les recommandations pour
économiser l’énergie ; qu’ils aient les moyens de le faire et qu’ils
n’aient pas de doute sur leur efficacité. Confiance, autonomie, exercice de
leur libre arbitre et instructions claires sont les mots clés. A l’inverse, des
comportements « inadaptés » s’expliquent notamment par le fait d’ignorer comment
fonctionne un équipement, de manquer de marges de manœuvre pour régler la
température de son bureau, de douter de l’impact de ses gestes sur les
consommations énergétiques, de juger les recommandations trop complexes ou
encore d’ignorer quel geste est le moins énergivore. Globalement, les occupants
qui se sont investis dans le concours CUBE 2020 sont des personnes ayant, entre
autres, un sentiment de contrôle personnel élevé.
La corrélation
positive entre les comportements pro-environnementaux au travail et le
sentiment de contrôle prouve ainsi le rôle clé du sentiment de maîtrise
personnelle dans la sensibilisation et la mobilisation des occupants d’un
bâtiment à réaliser des gestes d’économies d’énergie.
En bref, pour augmenter le sentiment
de contrôle personnel des occupants, il
est primordial de leur donner la possibilité de faire des choix et de prendre
des décisions. Par exemple, les candidats interrogés ont témoigné qu’avoir
la possibilité d’ajuster le système de chauffage à leurs besoins particuliers,
grâce à des thermostats ou des commandes individuelles, augmentait leur
implication individuelle en même temps que leur sentiment de contrôle.
« L’occupant va tout casser », ce cliché !
A l’origine, les professionnels se montrent réticents à donner plus de
marge de manœuvre aux occupants, tant au niveau de l’exploitation que de
l’utilisation : les occupants ne parviendraient pas à se mettre d’accord
et feraient un usage erratique et donc énergivore de régulateurs. « Chacun allait régler la climatisation toutes
les heures : personne n’est content », confiait un candidat. A l’occasion de CUBE, plusieurs
correspondants ont pourtant choisi d’individualiser le réglage de la
température en modifiant l’installation. De l’avis général, la décentralisation produit des effets bénéfiques au
moins diminuant les plaintes des occupants. Et en effet, la réalité semble loin
des stéréotypes des professionnels : en pratique, la décentralisation
accroît l’autonomie des occupants sur la régulation et devient une occasion de
communiquer avec les occupants sur le fonctionnement du matériel, par exemple
en donnant les principales consignes d’utilisation d’un thermostatique. « Quand je suis allé pour
l’installation, au départ ils m’ont dit : « on ne sait pas ce que ça
veut dire 1, 2, 3, 4, 5 ? ». Je leur ai expliqué que 3 c’est confort,
et que 2 c’était 19°C / 20°C » témoigne un des exploitants interrogés.
Delphine
Labbouz-Henry
Chercheur
associée au LAPPS, Université Paris-Ouest Nanterre-La Défense
Pour en savoir plus :
La synthèse de l’enquête sociologique Sociocube
Atelier Performance Energétique en milieu professionnel, « Le rôle clé des occupants d’un bâtiment de travail économe en énergie », Journées internationales de sociologie de l’énergie 2015 (piste audio)